Il y a de l'espoir pour l'Afrique, mais le continent doit déployer davantage d’efforts dans les domaines du renforcement des capacités, du leadership transformateur et du développement de la bonne mentalité pour que la coupe, qui est maintenant à moitié pleine, déborde.
S'exprimant en marge de la 3è session du Comité Technique Spécialisé de l'Union africaine sur les finances, les affaires monétaires, la planification et l'intégration économiques qui se tient à Yaoundé ; la capitale camerounaise, le professeur Emmanuel Nnadozie, Secrétaire exécutif de l'ACBF, a déclaré que l'Afrique n'était pas au niveau où tout le monde s’attend à la voir. Mais il y a de grands espoirs pour le continent.
«Nous avions à peine 20 universités sur tout le continent au moment de l'indépendance en 1960, puis quelque temps après, 200 universités. Mais aujourd'hui, nous avons près de 3 000 universités sur le continent ».
«Ce n’était pas comme si l’Afrique avait une indépendance fantastique. Non, ce n’était pas le cas. Nous n’avions pas d’hôpitaux, pas d’universités ni de compagnies aériennes, mais, aujourd’hui, Ethiopian Airlines est un succès retentissant. Regardez ce qui se passe sur le continent », a déclaré le professeur Nnadozie.
Il a cependant regretté que la fuite des cerveaux sur le continent ait eu raison des meilleurs cerveaux d'Afrique, mais a insisté que les pays africains devraient tirer le meilleur parti de cette situation en exploitant leurs diasporas à l'étranger et les mettre à contribution, comme le Japon, la Chine et l'Inde l’ont fait dans le passé avec leurs propres diasporas.
«C’est la raison pour laquelle j’en appelle aux pays africains pour qu’ils mettent en place un plan très délibéré visant à puiser dans la diaspora au plan du capital humain et financier», a déclaré le Secrétaire exécutif.
Leadership
Selon le professeur Nnadozie, l’une des choses les plus importantes dont l’Afrique a besoin à l’heure actuelle, c’est un leadership approprié. «Nous disons souvent que la mise en œuvre manque sur le continent à cause de l’absence de leadership», a-t-il déclaré. « Parce que si vous regardez les pays qui s'industrialisent aujourd'hui en Afrique, vous verrez quelque chose qui leur est commun : ils ont un leader soit révolutionnaire, soit transformateur qui donne le bon ton au sommet, donne la vision nationale, et mobilise réellement la population pour soutenir la vision ou crée des conditions favorables pour la mise en œuvre des stratégies ».
Afin de s’attaquer au problème du leadership en Afrique, l’ACBF lancera sa publication phare, le Rapport 2019 sur les capacités en Afrique (RICA) sur le thème «Favoriser un leadership transformateur pour le développement de l’Afrique», avec une préface du Président rwandais Kagame.
Le RICA 2019 se penchera également sur la promotion ou les institutions de leadership et sur la manière dont l’Afrique pourrait intensifier l’émergence de bons dirigeants.
À titre d’exemple, le professeur Nnadozie a cité le Rwanda comme un pays dans lequel le leadership a une bonne vision. «Mais pourquoi obtiennent-ils des résultats?», s’est interrogé Secrétaire exécutif. «C’est parce qu’à la fin de chaque année, les dirigeants rencontrent la population, passent en revue les progrès accomplis et planifient l’année d’après en fonction de la vision nationale »
«Si vous n’exercez pas un contrôle parlementaire strict, si vous ne disposez pas d’institutions solides, si vous n’avez pas un chef qui s’assurera que les choses bougent, vous ne ferez pas de progrès», a déclaré le professeur Nnadozie, avant d’ajouter : «la corruption a constamment baissé au Rwanda parce que si vous faites le mal, la punition suivra sans crainte ni faveur »
Renforcement des capacités
«Les capacités sont une chose très importante car leurs déficits en Afrique expliquent pourquoi certains bons programmes, plans et stratégies ne sont pas mis en œuvre pour atteindre les objectifs ou les résultats de développement souhaités. Il est donc important de prêter attention au renforcement des capacités, et plus particulièrement aux capacités des gouvernements et de leurs responsables », a déclaré le professeur Nnadozie.
Il a poursuivi en ces termes : «Quand on parle de capacité, les gens pensent à la capacité humaine, aux compétences, à l'expertise, à la connaissance, à la façon de faire les choses. Oui, cela en fait partie, mais ce n’est pas tout. Outre les capacités humaines, on a besoin de capacités institutionnelles car les institutions sont aussi importantes que les personnes qui y travaillent, qu’il s’agisse d’institutions régionales ou de celles basées dans les pays. Mais de nombreuses institutions n’ont pas de mécanismes institutionnels solides, elles n’ont pas les bons systèmes en place, elles n’ont même pas de personnel qualifié pour faire le travail correctement et obtenir des résultats ».
Les pays négligent souvent de renforcer des capacités intangibles telles que le développement d’une bonne mentalité, et en fin de compte, cette situation a des conséquences lourdes à supporter. Comme l'a expliqué le professeur Nnadozie: «Vous pouvez bien éduquer quelqu'un, lui donner le meilleur équipement au monde et de bonnes conditions, mais s'il n'a pas la bonne mentalité, il ne sera pas en mesure de produire les résultats souhaités »
Le professeur Nnadozie a cité la Chine où l’accent est mis sur la formation des personnes pour qu’elles aient la bonne mentalité, parce que les Chinois croient que «si vous croyez en vous, vous pouvez tout faire». L’Afrique doit donc développer la mentalité approprié selon laquelle « Nous n’avons pas besoin d'aide extérieure pour pouvoir faire avancer l'Afrique, les Africains doivent croire en eux-mêmes ».
Intiative ‘Ceinture et Route’ de la Chine
Le professeur Nnadozie a révélé que l'ACBF travaillait avec la Chine pour créer un institut panafricain d'amélioration, qui l'aidera à intensifier ses travaux en matière de renforcement des capacités.
"Nous aidons les pays africains à comprendre comment ils peuvent tirer parti de l’ ‘Initiative Ceinture et Route" de la Chine », a déclaré le SE. «Nous procédons à une analyse des coûts et des avantages de la relation Chine-Afrique. La chose la plus simple que l’on puisse voir est d’avoir des consultations et une bonne stratégie d’engagement avec la Chine car la Chine a une stratégie d’engagement avec l’Afrique, mais du côté africain, on ne voit pas de stratégie ».
«Deuxièmement, a poursuivi le professeur Nnadozie, l’Afrique doit adopter une approche de collaboration afin que nous ne travaillions pas les uns contre les autres pour dissiper nos intérêts et perdre nos énergies. C’est une opportunité qui peut aider les pays africains à s’attaquer en particulier à l’une des contraintes incontournables qui empêchent l’intégration régionale, à savoir le déficit en infrastructures. Comme vous le savez, la zone de libre-échange continentale et la circulation des biens et des services ne se produiront pas tant que ces problèmes ne seront pas résolus. »